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CAR WASH OU LA JAVELLISATION DE LA BLAXPLOITATION.

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    Si la Blaxploitation a, selon la vœu de ses pionniers, voulu combattre et offrir une autre représentation du Noir à l'écran, certaines œuvres, affiliées à ce mouvement, allaient participer à précipiter la fin du genre. Compte tenu du succès commercial qu'elle rencontra, Hollywood décida de s’en emparer. Mais cette ''consécration'' aurait un coût et des effets. L’un d’eux consista à soumettre ce genre à une opération de javellisation comme le montre le film Car Wash.     Réalisé en 1976 par Michael Schultz, le film raconte une journée ordinaire dans une station de lavage de voiture à Los Angeles. L’entreprise compte des ouvriers blancs, latinos et noirs. Se croisent ainsi, sous l’œil bienveillant d’un patron blanc, les espérances et les inquiétudes de chacun. D’une certaine manière, c’est la nation entière qui est représentée. La surreprésentation des noirs n’étant là que pour imprimer un sceau Blaxploitation au film.   Le discours d’affirma...

Un drapeau, un flingue, un ennemi.

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  En juin 1950, de la prison où il purge sa peine, le futur Malcolm X adresse une lettre au président Harry Truman qui vient tout juste d'engager le pays en Corée dans le premier conflit de la guerre froide. Il y écrit notamment : « J'ai toujours été communiste […] lors de la dernière guerre, j'ai essayé de m'engager dans l'armée japonaise, et maintenant on ne m’appellera ni ne m’incorpora dans l'armée américaine »1. Cette provocation, au moment même où le maccarthysme apparaît, fut suffisamment prise au sérieux pour que le FBI se décide à ouvrir un dossier sur cet illustre inconnu qui répond au nom de Malcolm Little. Cette prise de position mêlant le rejet de l’impérialisme et une désidentification avec l’Amérique blanche, contient certains éléments qui alimenteront des textes de rap  aux alentours des années 1990. Ces textes ont pour particularité de nourrir une opposition aux guerres impérialistes en même qu'une distance à l'égard du pacifisme. Ainsi...

1967. OUM KHALTOUM A PARIS.

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Dans son livre Le Proche-Orient éclaté , George Corm traçait un parallèle entre Nasser et Oum Kalthoum. Évoquant le pouvoir de la parole et les espoirs qu’ils surent tous deux porter, il écrivait que « des siècles de domination et de despotisme politique d’une part, des millénaires de traditions patriarcales et de conformisme affectif et amoureux d’autre part : voici ce que le verbe de Nasser et le chant d’Oum Kalsoum ont traduit pour ces peuples silencieux, dont ils ont un instant incarné la voix ».1      Si ces deux personnages, désormais inséparables, apparaissent désormais comme les deux figures les plus prolixes du monde arabe des années 60, la voix de Nasser s'était définitivement éraillée à la suite des funestes journées de juin 1967. La guerre des Six Jours, qui engendra un traumatisme profond et durable pour les nations arabes, sonnait le glas du nassérisme et des espoirs qu'avaient fait naître ce fameux rire lancé onze ans plus tôt à la face de l'imp...

A Propos de Mohamed Saïl, L'étrange étranger, écrits d'un anarchiste kabyle.

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     Figure méconnue mais première de l'anarchisme algérien, Mohamed Saïl voit le jour en 1894 à Taourirt, village du nord de l'Algérie. Il émigre très jeune en métropole où il vivra de divers métiers avant de s’illustrer une première fois en refusant de combattre durant la première guerre mondiale, ce qui lui vaudra d'être interné durant une partie du conflit. C'est dans la France d'après-guerre que Mohamed Saïl entame véritablement sa vie militante, en une période qui, en raison des migrations en provenance de l'empire colonial, fera de Paris la première capitale du Tiers-monde naissant 1     C'est une partie de cette existence toute entière dédiée à la cause anticoloniale et qui s’achève en 1953, que nous donne à découvrir le livre L'étrange étranger, écrits d'un anarchiste kabyle. Présenté par Francis Dupuis-Déri, l'ouvrage est composé d'une grande partie des écrits de Mohamed Saïl parus dans les titres de la presse libertaire comme l...

La Noire de...d' Ousmane Sembène

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  C'est après trois courts-métrages, dont Borom Sarret (1), qu' Ousmane Sembène réalise en 1966 son premier long métrage. Adapté d'une nouvelle de son recueil Voltaïque , et qui évoque l'expérience tragique d'une femme sénégalaise en France, cette histoire s'inspire d'un fait divers qui s'est déroulé à Antibes en 1958. Mais le film a également une résonance autobiographique. Car Sembène  résidera durant douze ans à Marseille. Il y sera docker jusqu'au jour où un grave accident de travail ne l'immobilise. C'est durant cette période d'inactivité qu'il écrit son premier roman, Le docker noir , qui est entre autres un précieux témoignage sur la présence et les conditions de vie de l'immigration africaine à Marseille.      Suite aux vents des indépendances, le Tiers-Monde voit l'émergence de cinéastes dont l'un des apports va consister à déranger un regard occidental jusqu'à lors exclusif. Ils ont pour nom Satyajit Ray, ...

Le Colonel Ben Daoud....Arabe tu resteras Arabe

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  Arabe tu resteras Arabe, même si tu t'appelles colonel Ben Daoud … telle est la formule devenue proverbiale pour signifier que, quelque soient ses efforts, l'indigène domestiqué ne pourra jamais effacer les traces d'une appartenance qu'il porte comme un stigmate et qui menace de ressurgir à tout instant. Mais qui est ce colonel Ben Daoud et de quoi est-il le nom ?       Si l’institution scolaire fut pensée comme un laboratoire privilégié pour construire un sujet hybride, l'institution militaire, quoique par d'autres voies, fut, dans le contexte colonial algérien, la première institution à avoir tenté de modeler cet individu de l'entre-deux . En effet, l'un des premiers rapprochements qui s’opéra durant la conquête de l'Algérie se réalisa par l'enrôlement d'auxiliaires indigènes au sein de l'armée française. Cette mesure, qui avait pour fin d’accélérer la pacification, ne suscita, dans un premier temps, que peu d'oppositions ...